Soule Mana, un jouet de Yayi pour le redressement fiscal des Journaux propres

6 mars 2008 - Embrigadement de la presse : Boni Yayi dépêche les Impôts aux trousses de « La Presse du Jour »



Dans la matinée du mercredi 05 mars 2008, le quotidien « La Presse du Jour » a reçu une correspondance de la direction générale des impôts et des domaines. Une correspondance qui vient confirmer les rumeurs selon lesquelles le gouvernement a décidé de mettre les impôts à nos trousses.

C’est désormais chose faite puisque l’ouverture du bal est annoncée pour demain. La preuve que le changement ne rime pas du tout avec la liberté de presse. Ce n’est plus une rumeur ! Boni Yayi veut en découdre avec « La Presse du Jour ». Il ne l’a pas caché et plusieurs personnes nous avaient mis en garde. « Ils vont fermer votre journal » ne cessent-ils de nous conseiller. Ils n’ont pas tort. Puisque des menaces ouvertes, nous en recevons tous les jours.

Ce qu’ils nous reprochent, c’est d’être critique vis-à-vis du pouvoir. Depuis lundi dernier, le gouvernement a mis sa menace à exécution. D’abord, un coup de fil de la direction générale des impôts demandant le siège du journal. Le lendemain mardi 04 mars 2008, une correspondance nous parvient nous adjoignant de fournir, dans un délai de quinze jours, certaines pièces. Vingt quatre heures après, c’est-à-dire le mercredi 05 mars 2008, tombe une deuxième correspondance demandant de prendre toutes les dispositions pour un contrôle le vendredi 07 mars 2008 à 10h 30 minutes.

 Le top est ainsi donné pour régler le compte à « ces indésirables ». Il y a un peu plus d’un mois, c’était « Le Béninois libéré ». Aujourd’hui, c’est « La Presse du Jour ». Que ceux qui soutiennent que Boni Yayi est un vrai démocrate, contrairement à ce que nous écrivons, sortent à présent la tête. « Le séjour d’un tronc d’arbre dans l’eau ne peut jamais le transformer en crocodile » a dit un sage africain. Boni Yayi est tout, sauf un vrai démocrate. Il aurait accepté tout, sauf une presse véritablement libre sous son règne, comme aiment le chanter un de ses ministres. Tenez : en dix ans de pouvoir, son prédécesseur n’a porté la moindre entorse à cette liberté de presse. Le régime de Boni Yayi, par contre, a réussi en moins de deux ans à embrigader toute la presse.

 

Le numéro 1 du changement veut d’une presse qui le mettra au-dessus de la lune, voire de Dieu. Ce que nous avons refusé de faire. Nous nous sommes inscrits dans la logique d’une presse critique oubliant que dans un royaume, il est formellement interdit de critiquer le roi même quand il danse mal. En nous envoyant le service des Impôts, Boni Yayi a voulu certainement nous contraindre à réviser notre position. Ce qui ne sera jamais possible, patriotisme oblige. Car, en réalité, le Bénin du changement se ramène à ce constat amer : le Roi veut contrôler la justice, le parlement, les syndicats, la presse, bref tout ce qui bouge. Ce qui malheureusement ne semble pas lui réussir. Grâce à ceux qui, comme nous, refusent de s’aplatir. Alors, la solution est toute trouvée.

Coupeurs de têtes

« La Presse du Jour » est née en 2006. Elle n’a même pas encore trois ans. Il y a des quotidiens qui ont plus de dix ans d’existence. Ils n’intéressent pas le roi parce que, eux, ils savent faire les choses comme le veut le roi. Il y en a au moins quatre qui l’entourent. Ce qui laisse croire qu’il n’est pas ignorant des réalités d’un journal dans le contexte béninois. Un journal, c’est plus des problèmes qu’autre chose. Un journal, c’est des abonnés qui n’honorent pas leur engagement. Comme la Présidence de la République qui traîne des dettes d’abonnement. En réalité, depuis 2006 nous n’avons reçu un rond du Palais pour le compte de cet abonnement. Pathétique, n’est-ce pas ? Et pourtant c’est vrai.

 

Un journal, c’est des papiers, des plaques, de l’encre à crédit. Un journal, c’est aussi des dettes d’imprimerie. C’est, enfin, des salaires impayés. Cependant que notre journal, pour le sérieux dont on le crédite, met un point d’honneur à payer ses employés régulièrement et à bonne date. Ce qui est une prouesse dans un environnement où des journaux, parfois soutenus à bout de bras par le pouvoir, traînent des années d’arriérés. Autant de choses que Boni Yayi sait mieux que quiconque et qui justifient d’ailleurs les trois cent millions que l’Etat accorde chaque année à la presse privée. Un bon démocrate devrait chercher à faire en sorte que la presse qui est l’un des piliers de la démocratie ne dépende plus de cette aumône qui ne dit pas son nom au lieu de tomber aussi bas. La démocratie, aujourd’hui, se ramène aux intimidations. Si vous ne chantez pas Boni Yayi, on vous colle les impôts. Les inspecteurs n’en sont absolument pour rien. Ils ne comprennent certainement pas pourquoi on les instruit pour redresser un pauvre journal.

Comme le Migan du temps du Danxomè, on leur remet des coupe-coupe pour trancher des têtes. Les impôts au service d’un régime de dictature ! Des inspecteurs de finances n’ont pu cacher leur étonnement dès la lecture de la correspondance qui nous a été adressée hier. « Pour une jeune société, c’est inadmissible. Votre problème doit être ailleurs » ne cessent-ils de clamer. Ils n’ont pas tort.

 

Notre problème c’est Boni Yayi et son régime. Un régime unique en son genre avec des ministres sans considération, des conseillers en panne d’inspiration. Un régime caractérisé par des marches à n’en point finir, une chasse éhontée aux adversaires politiques. Des réalités que « La Presse du Jour », jusqu’à la dernière seconde de son existence, ne cessera de dénoncer, patriotisme oblige. Les Béninois ont arraché leur démocratie de haute lutte. Ce n’est donc pas le changement qui viendra mettre un terme à cela.



08/03/2008
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